Dimanche 5 mai, 19h30. Je me connecte sur Auvio pour regarder le journal télévisé de la RTBF -ce qui, honnêtement, ne m’est plus arrivé depuis des mois. Le JT s’ouvre sur la manifestation “de dizaines de milliers de personnes dans les rues de Bruxelles pour la Palestine”. La présentatrice précise qu’iels demandent au gouvernement d’agir “face à un génocide décomplexé d’Israël”.
Quinze minutes après, au cours de ce même JT, le journaliste Thomas Gadisseux interviewe notre Premier ministre sur les 100 jours du gouvernement Arizona. On passe de questions liées à “la simplicité” et “l’humour” de Bart de Wever, aux réformes de notre sécurité sociale.
Vient ensuite la fameuse situation internationale.
La question est la suivante : “La crise* à Gaza est catastrophique. Pas un jour sans qu’on voit des images d’enfants qui meurent de faim. Que fait la Belgique ?”
*mot utilisé
Et là, Bart de Wever plonge en un quart de seconde dans le narratif israélien.
Ahurissant ! Aberrant. Mensonger.
Dans un élan de rapidité, une phrase à peine soufflée, Bart de Wever assume -ouf!- que “cette situation humanitaire est inacceptable”. Il dit bien humanitaire, jamais il ne dit politique. L’instant d’après, on a droit à “Israël est un état occidental et démocratique” - argument usé et défaillant.
Notre premier ministre ajoute, je le cite : “Israël doit prendre la responsabilité de corriger cette situation”.
Corriger cette situation ?!
On parle de l’extermination d’un peuple. On parle de famine fomentée, programmée. On parle de destruction et de massacre depuis des décennies.
Et puis arrive la question d’une reconnaissance d’un état palestinien par la Belgique. Bart de Wever sort son plus bel exposé et invoque le droit international (si cher à son coeur, you know). Il explique aux petit·e·s téléspectateur·rice·s que la Palestine ne sera reconnue que lorsqu’elle aura à sa tête un pouvoir crédible. :
“Il faut une autorité démocratique, c’est quand même le minimum. On ne va pas négocier avec des terroristes quand même hein !”
Ceci est un mensonge. Par omission. Par propagation. Par déni de la réalité.
Pas une seule fois le mot "génocide” n’est cité dans cette interview.
Pas une seule fois le journaliste ne reprend Bart de Wever sur son narratif. Pas une seule fois on ne parle de colonisation et d’oppression.
Cher service public, cher gouvernement : le silence TUE.
Et remettons les faits et les mots dans leur contexte. Voici ce qui a été dit ce dimanche lors de la manifestation qui s’est tenue à Bruxelles :
“Tant que les voix palestiniennes ne pourront pas résonner aussi librement que les nôtres , nous serons leur mégaphone, nous serons à leurs côtés.
Dans 4 jours, le 15 mai, nous commémorerons la Nakba.
C’est dire que la libération est un processus long.
C’est surtout dire que notre inaction a trop longtemps duré.
Nous sommes là pour exiger de notre gouvernement d’agir face à un génocide décomplexé d'Israël envers le peuple palestinien. Nous sommes sommes là pour s'opposer au projet israélo-étatsunien de nettoyage ethnique de Gaza.
On ne reçoit pas, on ne s'assoit pas à la table des genocidaires.”
(Extrait du discours de Monia Gandibleux)
Photo : Quentin Guyot